17/03/2009
"Chacun jouait son rôle dans une comédie à laquelle il ne voulait même pas participer."
La vie de Lewis bascule à l'âge de dix ans, quand il assiste, impuissant, à la noyade de sa mère, jeune femme fantasque et aimante.Vite remarié, ni son père ni sa jeune belle-mère ne parviendront à briser la carapace d'indifférence dans laquelle s'enferme le garçon. Cette attitude lui vaudra de se couper de la communauté bien-pensante dans laquelle sa famille évolue. Tant de violence rentrée ne peut, bien sur qu'exploser, ce qui lui vaudra deux ans de prison. En 1957, il a dix-neuf ans et sa révolte à sa sortie de prison, va faire exploser tous les faux-semblants et balayer comme un raz-de-marée toute l'hypocrisie de ce petit village du Surrey.
Délinquance, automutilation, violences conjugales, autant de mots qui me rebutaient d'emblée et pourtant, à peine avais-je commencé Le Proscrit que j'étais happée par les personnages, emportée par la houle des sentiments de Lewis, qui affecte une impassibilité toute britannique face aux affronts qu'il doit subir.
Sadie Jones fouille les replis des âmes et nous les montre dans toute leur crudité et leur vérité. Ainsi la tante de Lewis qui ne propose pas d'élever cet enfant avec les siens parce qu''elle sait confusément qu'elle ne pourra le supporter. On déteste avec force le hobereau, sorte de Dr Jekill et Mr Hyde, qui humilie Lewis et son père,on frémit en se disant que toute cette souffrance aurait pu si facilement ne pas exister, un peu moins de flegme, un peu plus de communication et on referme ce livre le souffle court. Un grand et beau roman.
Un grand merci à Cuné pour l'envoi.
Le proscrit , Sadie Jones; Buchet-Chastel, 377 pages.
L'avis d'Amanda, de Laurence, de Fashion, de Clarabel, de Lily.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : sadie jones, le proscrit, années 50, petite ville du surrey, rebellion
09/03/2009
"Femme soigneuse, bonne jardinière, j'élaguais les rameaux porteurs du doute."
Cela commence de manière bien proprette, bien lisse, Pearlie, Holland, un mariage heureux un enfant , une vie bien rangée . mais comme le répète la narratrice, l'heureuse épouse : "On est seulement nés au mauvais moment.", comprendre dans les années 50 , aux Etats-Unis, dans une société marquée par la guerre de Corée, la ségrégation raciale et le maccarthysme.
Pearlie aspire au repos mais l'irruption de Charles Drumer dans leur vie de couple risque de tout faire voler en éclats.
L'histoire d'un mariage est un roman qui multiplie les surprises faites au lecteur, en se jouant de ses a priori. Le thème lui aussi va se révéler surprenant car la narratrice va se rendre compte qu'elle écrit -en creux- l'histoire d'une guerre, sans récits de combats, mais pas sans violence, une violence larvée et qui prend des formes multiples.
Fiction et réalité se mêlent en une troublante mise en abîme , "percevoir sa vie comme un roman qu'on a écrit et auquel on a cru." et si Andrew Sean Greer revient sur le thème classique "Nous en connaissons pas vraiment ceux que nous aimons", il l'aborde d'une manière originale même si le récit perd un peu de sa vigueur dans la dernière partie. le style est agréable , même si , à force d'avoir été induit en erreur, le lecteur en vient à s'inquiéter à chaque rétention d'information : Nouveau chausse-trappe ou pas ?
Un grand merci à Cuné pour l'envoi !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : andrew sean greer, l'histoire d'un mariage
28/02/2009
"La vie n'était-elle pas plus facile sans cette femme si difficile ? "
Une exposition rassemblant tableaux mais aussi vêtements emblématiques de la célèbre Rachel Kelly, qui vient de décéder brutalement, voilà le point de départ de chacun des chapitres du roman de Patrick Gale, Tableaux d'une exposition.
A la présentation parcellaire ,et forcément lacunaire , de chacun des éléments de cette rétrospective, répond le texte du roman qui explore au plus près l'univers d'une femme fascinante, à la fois mère et épouse prédatrice , mais aussi passionnée, excentrique et si vivante quand la dépression la laissait tranquille. Une femme brûlée par son art et qui, bien involontairement , laissa derrière elle une famille déchirée . Cette famille possède cependant un centre de gravité , un homme exceptionnel lui aussi : Anthony, le père et l'époux, sorte de roc inamovible, quaker qui sut aimer et protéger tous les siens .
Pas de portrait à charge cependant, Patrick Gale avec la sensibilté qu'on lui connaît brosse ici le tableau d'une famille dont les enfants, très jeunes ,ont appris à composer avec la maladie de leur mère, et plus âgés ont eu du mal à se confronter à son talent... Nous découvrons petit à petit les différentes facettes de cette femme qui refusait de parler de son passé.
Les rebondissements et les changements de point de vue rendent le récit si vivant et rapide qu'on ralentit le rythme de lecture pour savourer un peu plus longtemps ce roman qui vibrera longtemps en nous. A noter que l'auteur réussit le pari ,si souvent raté, de nous faire voir les tableaux de Rachel. Une réussite !
Un livre tout corné, évidemment.
Tableaux d'une exposition. Patrick Gale. Belfond.360 pages fulgurantes.
06:05 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (13) | Tags : patrick gale, tableaux d'une exposition, peinture, mère prédatrici, maniaco-dépression, art et maternité, magnifique portrait de famille et de femme
25/02/2009
"La violence réprimée s'est transformée en guerre contre les femmes. Une guerre qui ne connaît ni règle ni limite."
Clare Hart, à la fois journaliste et profileuse ,enquête sur le trafic des femmes en Afrique. Parallèlement, elle va collaborer avec la police pour découvrir l'identité d'un tueur en série qui s'en prend à de très jeunes femmes de Cape Town.
Plongée dans le monde de l'industrie du sexe sud-africaine Les captives de l'aube est un roman n même s'il souffre de quelques défauts mineurs. On se demande par exemple comment l'héroïne est devenue profileuse (mais peut être allons-nous l'apprendre dans un prochain volume). En outre la résolution de l'enquête doit autant aux informateurs arrivant fort à propos qu'aux talents conjugués des policiers et de la journaliste.
Abstraction faite de cela, Margie Orford sait habilement tisser les liens entre le passé et le présent, donner de la chair à ses personnages tout en glissant au passage quelques unes de ses convictions concernant la violence faite aux femmes, en bonne journaliste d'investigation qu'elle est, sans pour autant alourdir le récit.
Loin de la profileuse à l'intelligence aiguë et quasi désincarnée que l'on rencontre chez Andrea Japp (et dont j'avoue m' être lassée), Clare Hart se montre beaucoup plus humaine et donc forcément plus touchante. J'attends déjà avec impatience la suite de ses aventures qui savent montrer la violence sans voyeurisme complaisant.
06:05 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : les captives de l'aube, margie orford
23/02/2009
Un compagnon de cheminée
"Nous ne pouvons rendre heureux quelqu'un qui ne nous rend pas heureux."Telle est l'une des réflexions que se fait le Dr David Mc Bride lors d'un de ses entretiens avec l'une de ses patientes, admise dans son service après une tentative de suicide,Elizabeth Cruikshank. Cette dernière n'acceptera de lui livrer sa Part obscure qu'après une allusion à un tableau du Caravage. Commence alors une relation, où Elizabeth, jouant le rôle de catalyseur, va totalement bouleverser la vie du Dr Mc Bride.
Le roman de Salley Vickers, professeur de littérature et psychanalyste, est centré sur les entretiens entre le psychiatre et sa patiente, comme un foyer ardent autour duquel gravitent des personnages à la fois drôles et attachants, qu'ils soient patients eux aussi ou collègues. Les entretiens sont passionnants car ils abordent des thématiques qui nous parlent forcément : la difficulté que nous avons à changer de vie , à accepter la vérité de nos rapports avec les autres, la nécessité d'un regard extérieur pour comprendre ce qui nous unit aux autres... Il est plaisant de voir que le Dr Mc Bride, dans son désir de sauver les autres ,n'est pas capable de voir ce qui se passe sous son nez,mais la manière magistrale dont il réagira le fait encore grandir dans notre estime. Il ne se montre jamais borné mais profondément humain, jusque dans ses erreurs,et sait même reconnaître la supériorité d'un petit déjeuner roboratif sur n'importe quel traitement ou utiliser des maximes de la tante d'un de ses patients !
Alternant humour et émotion, La part obscure mène également une réflexion sur les rapports entre l'art et la vie, jamais de manière pédante ,mais toujours passionnante et l'on se prend à envier aussi bien les élèves que les patients de cette auteure.
Mon exemplaire a battu le record de pages cornées et ce depuis les deux ans et demi d'existence de ce blog ! Un livre intelligent et qui résonnera longtemps en moi.
06:05 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (21) | Tags : salley vickers, la part obscure, le caravage, psychanalyse, art
20/02/2009
"Une inversion de la vie en plein milieu, comme une conclusion prématurée..."
Récit d'une histoire familiale marquée par une forme précoce de la maladie d'Alzheimer, L'histoire de l'oubli alterne les points de vue d'un grand-père et de son petit-fils qui ignorent tout l'un de l'autre.
N'ayant aucun goût pour les récits allégoriques, j'ai allègrement passé l'histoire d'Isidora, lieu mythique, légende familiale qui va rétablir le lien entre les membres de cette famille que la maladie et les secrets ont fait éclater.
Bardé de commentaires dithyrambiques, ce premier roman est certes un bon roman mais il ne confine pas au génie. J'y ai retrouvé une atmosphère déjà rencontrée dans d'autres romans américains et seul le thème de l'oubli m'a paru original. Le style est agréable et fluide.
Merci à Laure , qui elle a beaucoup aimé et me l'a gentiment prêté, et à Cuné qui me l'a transmis.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : histoire de l'oubli, stefan merrill block
18/02/2009
"Le lieu rappelait un navire qui coule"
Un père violent , qui se donne des allures de fanatique religieux mais qui est surtout un alcoolique invétéré, une mère tout juste décédée, un petit frère, une petite soeur, qu'il faut, tant bien que mal, préserver, on pouvait rêver d'une adolescence plus riante pour Shell.Le tout dans une Irlande très catholique.
Pourtant l'ado arrive à tenir bon, même quand la vie s'acharne sur elle et qu'elle se retrouve au centre d'un fait-divers particulièrement sordide.
Le tout aurait pu être glauque et pathétique ou d'un optimisme forcé mais Siobhan Dowd réussit le pari de rendre cette histoire , inspirée de faits-divers, émouvante mais pas larmoyante.
Une auteure à suivre.
Sans un cri.Siobhan Dowd Editions Scipto.358 pgaes.avril 2007
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (8) | Tags : sans un cri, siobhan dowd, irlande, adolescente
17/02/2009
"Ils ont une morale de serpents à sonnettes"
Nick Guest n'est même pas un Rastignac anglais. S'il loue une chambre dans l'hôtel particulier de la famille du député conservateur Gerald Fedden, c'est simplement parce qu'il est ami de ses enfants, Toby et Catherine. Ainsi sera-t-il amené à fréquenter tout le gratin de la société londonienne et à devenir ami avec la jeunesse dorée -voire clinquante- qui s'ennuie élégamment entre prises de coke et parties fines.
Avec un humour pince -sans -rire mais aussi corrosif, Alan Hollinghurst nous peint ici le portrait d'un jeune homme tiraillé entre ses origines et le milieu qu'il fréquente, confronté à un monde dont il découvrira les coulisses mais auquel il n'appartiendra jamais totalement. C'est aussi l'occasion de brosser le portrait de ces années 80 , les années fric, mais aussi les années- Sida, ce qui donne au roman une tonalité douce -amère au fur et à mesure de son avancée dans le temps.
Alan Hollinghurst réussit à ne pas rendre antipathiques des personnages qui au départ n'avaient rien pour me plaire , ces play-boys gays et oisifs qui n'osent pas assumer leur sexualité par exemple , ou ce député inamovible qui méprise ses électeurs mais réussira toujours à se sortir de tous les chausse-trappes que le sort lui réservera, entre un concours de lancer de bottes et un scandale financier.
Le style est chatoyant et alerte. 635 pages qui se lisent sans faiblir.
Ce roman a obtenu le Man Booker Prize en 2004.
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16/02/2009
Pour ceux qui aiment être déstabilisés
David Case, quinze ans, se sentant poursuivi par le destin, change d'apparence et d'identité et prend la fuite...Au fil de ses rencontres, david devenu Justin, plongera dans le plus profond désespoir mais saura aussi trouver de précieux alliés, réels ou imaginaires...
Je n'ai pas vraiment adhéré à Si jamais... , y trouvant trop d'invraisemblances et d'incohérences. Certes, Meg Rosoff trouve un subtil équilibre entre fantastique et réalisme, déstabilisant le lecteur pour son plus grand plaisir, mais cette fuite éperdue m'a paru trop longue. Le portrait de cet adolescent tourmenté est fouillé mais tourne un peu en rond. Restent les descriptions originales et pleines d'humour noir dont je me suis régalée.
Ainsi , "David était peut être un de ces garçons qui trouvaient l'adolescence inconfortable. Ce n'était qu'une phase - une étape ponctuée de délires, d'incohérences, de hantises, d'insomnies dont il émergerait calmé et mûr pour réussir son bac, décrocher un bon boulot, rencontrer une chouette fille , acheter une maison, élever des enfants, prendre sa retraite, avoir une crise cardiaque et se réjouir d'une belle affluence à son enterrement."
La description de la rentrée des classes m'a également réjouie , j'ai apprécié aussi le vocabulaire parfois soutenu (effet de la traduction ? ) mais ces "morceaux choisis" ne m'ont pas empêché de déplorer un sentiment d'inachevé.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : si jamais, meg rosoff, destin, adolescence
14/02/2009
Vient de sortir en poche
Billet ici!
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : cochon d'allemand, kund romer