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12/08/2009

le coeur est un muscle involontaire

 

Florence déteste les livres , les écrivains et les chiens. Elle bosse avec Zéno, partageant avec lui un  sentiment à mi-chemin entre amour et amitié , sentiment dont Monique Proulx  parle  très joliment: "Un jour Zéno et moi,  quand on sera tout à fait grands sans  être vieux, on inventera un sentiment  bien plus aérien que l'amour, bien plus ardent  que l'amitié, dans lequel, nuit et jour on pourra s'étendre pour réparer nos cassures.
En attendant, on a ça, ce petit paquet de chaleur et de chardons."
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Florence, bien malgré elle, va se retrouver à la poursuite d'un écrivain "invisible", sorte de Salinger québécois, qui lui a volé une phrase, celle qui donne son titre au roman : Le coeur est un muscle involontaire (écho de Le coeur est un chasseur solitaire ? ). Cet écrivain mystérieux,Pierre Laliberté,  dont elle n'a que faire, évidemment  est l'idole de Zéno...S'en suit alors une quête pleine de péripéties et d'humour, où notre héroïne devra s'accommoder de cadeaux fort encombrants, dont je me garderai bien de révéler la teneur :" Je suis tombée sur une jovialiste, c'est bien ma chance."et apprendra petit à petit à voir le monde d'une façon différente.
On pleure, on rit, on note au passage quelques jurons bien sentis que l'héroïne s'adresse pour se fustiger : "manche à balai irascible", "maudite limace molle", on applaudit des deux mains aux descriptions hallucinées d'un centre commercial ou, plus poétiques mais tout aussi inspirées, du centre de New-York, bref on passe un excellent moment car Monique Proulx possède tout à la fois le sens du récit et une écriture chatoyante.

Le coeur est un muscle involontaire, Monique Proulx, Editions Boréal, 399 pages pleines de charme.

Merci qui ? Merci, Cuné évidemment !:)

03/08/2009

La bouffe est chouette à Fatchakulla

Bienvenue à Fatchakulla, petit comté tranquille , entouré  de marécages brumeux à  souhait.  Comme il ne se  passe rien, ou presque, on y boit sec, on chasse ,on pêche et on chouchoute des matous un peu hors-normes : "Quant à l'heureux propriétaire  de cet être hors pair, un chat à six doigts, à grosse tête,atteint  de  strabisme,  il pouvait compter sur toute une vie de félicité." Alors  quand " le  plus fieffé  salaud du canton de  Fatchakulla", j'ai  nommé  Oren Jake Purvis  qu'on soupçonnait de  faire  disparaître certains de ces matous -entre autres forfaits - est retrouvé mort , il ne s'est pas trouvé grand monde pour le pleurer.
Mais les victimes s'accumulent, éparpillées un peu partout , façon puzzle, comme aurait dit Audiard, et les esprits s'échauffent, d'autant plus que certains morceaux sont portés manquants...51vfFbTVgXL._SL500_AA240_.jpg
La  bouffe  est chouette à Fatchakulla est un divertissement  très réussi, à la croisée du Lézard lubrique de Melancholy cove et de Fantasia chez les  ploucs.On y sourit, on y frissonne et  très souvent en le lisant me sont venues  des images tirées des Mystères de l'Ouest (la série ,pas le film, grandguignolesque  et boursouflé), pour  ce qui  concernait l'élucidation du mystère...

Un grand  merci à Cuné !

Ned Crabb, La bouffe est chouette à  Fatchakulla, Folio policier, 267 pages , seulement !

24/07/2009

5 octobre, 23 h 33

Flic d'expérience, le shérif Carl Houseman, va se  trouver confronté à un suicide ou crime qui va le plonger dans un monde  bien différent de son Iowa banal.417iRVj78FL._SL500_AA240_.jpg
Méfiante j'aurais pu être : éloges dithyrambiques sur la 4 ème de couv' de ce roman policier(dont un de Michael Connelly), allusions  à des rites liés aux vampires, en plein Iowa contemporain, alors que j'avais été préalablement  échaudée  par un roman français utilisant les mêmes ressorts (Les morsures de l'aube de Tonino Benacquista, pas de billet)  mais bon il y avait la caution de Cuné alors  je me suis lancée...et je n'ai pas  pu lâcher ce bouquin ,dévoré d'une traite.
L'opposition entre les jeunes gens gentiment ( à première vue) bizarroïdes habitant dans une grande maison placée sous le signe du  gothique et le flic brut de décoffrage mais à l'usage pas si plouc qu'il en a l'air est tout à fait réjouissant.On explore, ravi, les méandres tortueux de l'âme humaine tout en découvrant le quotidien de ce shérif aguerri qui subit les lourdeurs administratives, les humeurs de  ses subordonnées et regrette de n'entrevoir sa femme que de rares instants, le tout rythmé par le suivi de l'enquête, quasi heure par heure. Un Page turner diablement  efficace !

5 octobre, 23 h 33, Donald Harstad, Points seuil.

 

L'avis tout à fait enthousiaste de Cuné que je remercie encore, et qui l'a placé dans la catégorie " excellent".

23/07/2009

Jour de fête à l'hospice

Premier roman de John Updike,(dont javais déjà lu plusieurs romans il y a belle lurette (non chroniqués ici)), Jour de fête à l'hospice n' a pas su m'accrocher. J'ai trouvé la  narration pesante, alourdie par ces longs monologues intérieurs qui entravent l'action plus qu'ils ne la propulsent. L'idée était pourtant intéressante: celle de  confronter les pensionnaires d'un hospice de vieux au monde extérieur à l'occasion de la seule  journée de l'année où les personnes étangères à ce huis-clos forcé peuvent y faire une brève incursion. Unité de temps, de lieu mais les interrogations des pensionnaires m'ont paru superficielles et je ne me suis attachée à aucun d'entre eux.  Echec sur toute la ligne, tant pis !51Ppv2TRwhL._SL500_AA240_.jpg

Merci au Blog-o-book et aux éditions Robert Laffont

L'avis de Tamara, plus positif.

22/07/2009

Lydia Cassatt lisant le journal du matin

"Ceci est une île , composée de May et de moi, de son pinceau et de mes gants, de ma douleur et de son regard. Sur sa toile, je me mue en une  femme en bonne  santé,  vêtue  de bleu et de blanc.  le soleil  et le pinceau me guérissent, le pinceau et le soleil, et les oiseaux français dans un jardin français." May  ,c'est Mary Cassatt peintre américaine impressionniste ayant cotoyé -et aimé- Degas ,  dotée d'une énergie folle. Celle qu'elle peint ainsi à de nombreuses reprises c'est sa soeur aînée, Lydia . Lydia qu'elle aime d'un amour  total , Lydia qui va mourir  même si  chacun s'obstine à le nier,sauf la malade elle-même.51KLac1yjsL._SL500_AA240_.jpg
Harriett Scott Chessmann choisit donc  d'interroger cette constance dans la relation peintre -modèle en consacrant un chapitre par tableau peint à la fin de la vie  de Lydia, (ces toiles sont d'ailleurs représentées au centre de l'ouvrage).
Pas de biographie donc à proprement parler car l'auteure s'est "immiscée dans leur univers par la pensée  l'imagination et par le rêve", soulignant au passage la  dichotomie entre les deux  soeurs, l'une pleine de vie,  revendiquant: "Je suis une artiste. Je suis indépendante. C'est le seul moyen  pour une femme d'en être une." et pleine de lucidité répond à sa soeur lui  demandant si elle  va épouser  Degas"-Je ne peux évidemment pas l'épouser,  Lyddy(...)Comment le pourrais-je , il anéantirait ma peinture,  il m'anéantirait moi-même . je  n'aurais pas  le  moyen de m'en tirer." Lydia,  plus posée  mais néanmoins tout aussi clairvoyante  et qui n'aura finalement peut être pas eu la plus mauvaise part...
L'écriture d'Harriet Scott Chessman, pleine de couleurs et de métaphores  rend palpable l'émotion qui se noue entre les deux soeurs au fur et à mesure que le terme arrive et restitue à merveille  l'atmosphère de cette époque. On a envie  de découvrir plus à loisirs tout ce monde rempli de lumière et de  douceur où rôde la mort.

 

Lydia Cassatt lisant le  journal du matin, Harriet Scott Chessman,  Folio,  223 pages lumineuses

21/07/2009

Si loin de vous

1964, Jun Nakayama, qui  fut une star du cinéma muet aux Etats-unis, par l'intermédiaire d'un  jeune scénariste , est amené à  se repencher sur cette période du début du XXème siècle. Etre un japonais aux Etats-Unis, toute vedette qu'il était, n'allait cependant pas sans poser de nombreux problèmes, plus ou moins larvés.519PyehzQZL._SL500_AA240_.jpg
Nina Revoyr évoque avec beaucoup de charme ce personnage tout en retenue et courtoisie , qui gagne en complexité au fil du roman car visiblement sa retraite forcée n'était pas seulement due à l'irruption du cinéma parlant , ou à une quelconque xénophobie ou lassitude du public ,mais semble bien plutôt liée à l'assassinat inexpliqué d'un metteur en scène britannique.
Fêtes somptueuses, hystérie du public féminin, fonctionnement des studios de cinéma, Nina Revoyr prend plaisir à retracer ici les premiers pas du cinéma, tout en montrant les ambiguïtés d'une société qui adule  et rejette tout à la  fois les  étrangers venus fouler son sol, les cantonnant dans des rôles trop souvent stéréotypés.
La narration s'essouffle cependant un peu à mi-parcours, trop de retours en arrière ,avant que la vérité n'éclate sur un final très surprenant. Un moment de lecture tout à fait charmant.

Si loin de vous,  Nina Revoyr, Phébus, 374 pages sépia.

Merci à Suzanne de Chez les  filles et aux éditions Phébus.

L'avis de Clarabel.Chezlesfilles[3].jpg

20/07/2009

L'heure trouble

L'heure trouble c'est l'heure juste avant la tombée de la  nuit,  l'heure à laquelle un enfant disparaît dans le brouillard épais d'une petite île de la Baltique. Vingt  ans plus tard, alors que la mère de l'enfant navigue entre alcool et petites pilules, le grand-père maternel reçoit par la poste une  des chaussures de  son petit-fils...51AkiGSzxsL._SL500_AA240_.jpg
Alternant passé et présent, point de  vue du grand-père qui , avec ses vieux amis, anciens marins comme lui,  va malgré  ses  difficultés motrices, relancer l'enquête, point de vue de la mère qui va , petit à petit ,accepter l'inacceptable, Johan Theorin tisse ici un roman original et passionnant. Impossible de lâcher les personnages, frustrés que nous sommes de ces retours dans le passé qui vont, petit à petit, dissiper le brouillard  et mettre en place les pièces du puzzle d'une tragédie qui n'aurait jamais dû exister si...
De beaux portraits psychologiques aussi  et un éloge de  la lenteur à ne pas négliger "Je ne fais pas  l'intéressant, dit-il.  Je pense seulement  qu'il vaut mieux raconter les histoires à son propre rythme. Autrefois,  on prenait son  temps, maintenant il faut que tout aille si vite." Dont acte.

L'heure trouble,Johan Theorin , 422  pages totalement maîtrisées.

L'avis de Mango qui m'a donné envie d'emprunter ce  livre à la médiathèque.

 

16/07/2009

Un crime dans le quartier

Vingt ans après les faits qui ont bouleversé l'été de ses dix ans , la narratrice, Marsha, se souvient  de ce Crime dans le quartier,quartier bien propret de  Washington  DC.
1972,  tandis que  les  Etats-Unis commencent  à  vivre au rythme  de  ce qui va devenir l'affaire du Watergate ,  un enfant est assassiné. Le tueur ne sera  jamais retrouvé, nous le savons d'emblée ou presque. Il ne s'agit donc pas d'un roman policier mais de la volonté pugnace de la narratrice de revenir sur cet été où le monde autour d'elle a volé en éclats, où elle a appris  par elle même ce que lui avaient déjà transmis de manière implicite les  femmes  hautes en couleurs de sa  famille :  les hommes  ne sont pas fiables, il n'y a pas  de lieu sûr en ce monde.51UkLsMLYFL._SL500_AA240_.jpg
Observatrice  inlassable ,"fanatique" comme le lui dira plus tard sa  mère, Marsha note sur un cahier tous les menus événements qui jalonnent cet été , autant de repères auxquels  se raccrocher mais aussi  autant d'indices  fallacieux pour  accuser le nouveau voisin , célibataire et réservé,  qui peine à s'intégrer dans le quartier...
Cruauté de l'enfance, accusations  injustes, des  thèmes  qui ont déjà  souvent  été explorés dans la littérature mais que la  peinture précise à l'extrême de Suzanne Berne renouvelle avec bonheur.  Nous suivons avec un intérêt extrême la vie de cette famille,  analysée de manière très fine et le roman vaut aussi par l'ambiance , mélange de calme apparent et d'hystérie feutrée.

 

Suzanne Berne,  Un crime dans le quartier, livre  de poche, 317 pages à savourer une citronnade  à la  main.

L'avis de  Cuné

10/07/2009

Les jardins de la mort

En 1985, à Washington DC sévit un tueur en série, "le Tueur au palindrome" car ses victimes sont des enfants dont le prénom peut se lire de droite à,gauche et inversement.
Vingt ans plus tard, Asa, un jeune Noir est retrouvé mort ,lui aussi dans un jardin. Gus Ramone va mener l'enquête tandis qu'en parallèlle Dan Holiday et TC. Cook , d'anciens policiers se remettent en selle pour résoudre cette affaire qu'ils ont vécu comme un échec cuisant .41RKFwatyFL._SL500_AA240_.jpg
Ma première incursion dans l'univers de George Pelecanos est globalement une réussite. En effet, l'auteur réussit à mêler avec brio plusieurs intrigues et à renouveler le thème des affaires en souffrance qui reviennent à l'ordre du jour.
Son personnage principal,  Gus Ramone, n'est pas qu'un flic. c'est aussi un mari qui  tente de  préserver son couple  et un père qui  essaie  de protéger son fils  aîné  du racisme  qui sévit à bas bruit dans un quartier qui prône officiellement la diversité ethnique...
J'ai parfois haussé les  sourcils devant certaines paroles machistes( mais  bon, ne nous voilons pas la face) et franchement rigolé devant certaines maladresses  de traduction  concernant l'argot lié aux pratiques  sexuelles. "Ce soir pas de tagada",  ou "Et si je te tirais sur le jonc ? " ne sont plus franchement  d'actualité... Mais bon, ce ne sont que  des péchés véniels et je poursuivrai volontiers ma  lecture de cet auteur déniché à la médiathèque.

 

Les  jardins de la mort, George Pelecanos,  points seuil.

 

07/07/2009

La troisième Miss Symons

Pauvre Henrietta! Elle n'est que La troisième Miss Symons et peine à trouver sa place dans cette famille victorienne de sept enfants , évidemment pas tous désirés.
Ne parvenant ni à nouer d'amitiés ni d'amours durables , Etta va donner libre cours à son mauvais caractère et, ayant épuisé les différentes solutions que lui offraient la société de l'époque  (tentative de reprise d'études, mère de substitution pour une de ses soeurs puis pour les enfants de celle-ci,- enfants hélas morts en bas âge-, dame patronnesse fort maladroite), elle va donner libre cours à son mauvais caractère et devenir une de ces vieilles filles typiquement british qui arpentent le monde pour mieux se fuir.
On sent que l'auteure s'est régalée à peindre avec une ironie mordante ses personnages, soulignant ainsi le repli stratégique de la mère de famille nombreuse dans la maladie une fois ses filles "casées", ou faisant prononcer avec étonnement ces paroles par une compagne de classe d'Henrietta alors que cette dernière vient de révéler son caractère déplorable: "Qu'arrive-t-il à ma jeune amie ? Serait-elle atteinte d'hydrophobie? Je vais être gentille avec elle et tâcher de l'en guérir avec du chocolat.".Flora M. mayor fouille à loisir l'âme d'Henrietta qui, trop brusque et maladroite, n'arrive pas à montrer ni sa générosité ni son trop plein d'amour inemployé.
Comment Henrietta est-elle passée de cette appréciation d'un de ses professeurs : "Etta est une fille intéressante, elle a des 616pMZ+rRBL._SL500_AA240_.jpgdispositions. Je me demande ce qu'elle deviendra ."à ,quelques années plus tard à l'occasion d'une rencontre entre les deux femmes : "Quelle gourde cette Miss Symons; elle me donne envie de la secouer." ? Un beau gâchis social donc mais une petite merveille de concision et d'humour acidulé qui enchantera tous les amateurs de littérature britannique.

Ps: on ne peut s'empêcher malgré tout d'éprouver de la sympathie pour cette femme qui "à près de quarante ans n'allait pas se laisser amadouer comme une gamine " et qui, si elle terrorise les serveurs et les femmes de chambre"sous des dehors dominateurs [...] était faible , indécise et soumise"...

La troisième Miss Symons, Flora M. mayor, Editions Joëlle Losfeld, 128 pages qui sont déjà sur l'étagère des indispensables!

 

L'avis de Lou