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17/12/2008

"...c'est l'antagonisme qui crée la beauté."

Ah, il l'a mauvaise Mohamed ! Non seulement sa fille "unique et préférée" Myriam poursuit ses études loin  de lui à Toulon, mais en plus elle vient de lui forcer la main pour qu'il cohabite avec son amoureux, un nommé Gaston Leroux (comme l'auteur, pas la chicorée), un Gaulois pur jus !  Forcément, ça va faire des étincelles (d'autant plus que Mohamed est artificier...).41v8yruyEEL._SL500_AA240_.jpg
Alors, pour  retrouver sa sérénité, le père bougon se réfugie dans les contes et légendes  qu'ils partageaient avec sa fille quand  elle était petite, des contes qui tissent un lien entre le passé de 'Algérie et le présent  parisien.  Mais attention, ces contes qui s'entremêlent savamment avec la  réalité,il y parle "avec des mots d'aujourd'hui.ça  va vite, il fait swinguer les phrases et les mots d'argot.", ils ne sentent pas la naphtaline !
Commencé sur un mode humoristique et léger, le roman,au fil des récits du passé algérien gagne en gravité et profondeur. On sourit d'abord de ce père qui ne veut pas admettre que sa fille n'est plus à lui tout seul. On a le coeur serré quand le roman  se termine  et on  se sent  un peu orphelin à l'idée de quitter ces personnages croqués avec la verve d'Akli Tadjer.

Akli Tadjer. Il  était une fois  peut être pas. JC Lattès.327 pages

D'autres romans  de l'auteur :  ici et ici

10/12/2008

Rhésus , reviens !

Shocking !  Non seulement les Vieux éprouvent  des sentiments mais  ils ont aussi une sexualité active ! L'irruption dans une maison de retraite d'un singe Bonobo  érotomane et gérontophile va rendre l'atmosphère plus qu'électrique !
Héléna Marienské  s'est visiblement beaucoup  amusée  à l'écriture  de ce roman joyeusement  iconoclaste où la  diversité des narrateurs permet tour à tour de convoquer différentes formes d'écriture : journal  intime,  haïkus, poésie...sans oublier des références  à Pantagruel, Ulysse, Homère (avec un Hector  haut en couleurs!).51QZNJRL14L._SL500_AA240_.jpg
La Lectrice (désolée messieurs !)  est parfois prise  à partie  de manière vigoureuse et féroce :  "Récapitulons, depuis  le  début, des  vieux et rien que des  vieux ou  des  vieilles, eux aussi  dans l'attente. Et l'on t'infligerait maintenant,  Lectrice, une  description en règle de corps  décharnés et concupiscents se  livrant à d'inconcevables  débauches ? des mains tavelées, aux veines  turgescentes, aux ongles  incarnés, et secouées de  hoquets plus ou moins parkinsoniens,  vont donc , sous tes yeux horrifiés, s'agiter et précisément  dans le sens  du plaisir, Où va-ton ? "
On croise aussi un premier ministre et un ministre  de l'intérieur qui se haïssent avec ardeur,  plus vrais  que nature ,et l'on se laisse  emporter  par ces flots agités , où l'on  est d'ailleurs soi même souvent secoué de rire. Petit bémol, le dernier chapitre (dont je ne vous révèlerai  pas la teneur) jette une éclairage un peu daté sur ce qui n'a été qu'un feu de paille médiatique et vient  gâcher notre plaisir  en donnant une dimension un peu trop terre à terre à cette lecture par ailleurs jubilatoire. Décapant et réjouissant !

06/12/2008

piqûre de rappel !

Ron l'infirmier s'appelle en  réalité William Réjault, c'est du moins sous cette identité qu'il apparaît sur la couverture de La  chambre d'Albert Camus et autres nouvelles qui vient de sortir en poche.9782290005613.gif

Billet ici !

04/12/2008

Une pâle beauté

Commencée avec Les rois et les voleurs, récit d'une adolescence  à cent  à l'heure, mon immersion radieuse dans l'univers de Muriel cerf s'est logiquement poursuivie avec L'antivoyage, roman relatant ses périples en Asie.41XpWGbHhnL._SL500_AA240_.jpg
Babel vient d'avoir l'excellent idée de rééditer ce premier roman  de Muriel Cerf, l'occasion pour  ceux qui  ne la connaîtraient pas  encore de se  frotter à son univers bigarré et foisonnant.
Sa langue baroque et chatoyante charrie tour à tour l'or et la boue, son narcissisme séducteur  fascine le lecteur, le tout nous entraîne  dans un monde flamboyant. A découvrir absolument !

Le site de l'auteure

28/11/2008

"Moi, c'est mon âme qui ne bat plus."

Celui qui parle ainsi c'est Slimane. Slimane qui admire et chérit son grand frère Maxence . Avec lui le  quotidien  est un peu plus doux car  "il fait danser la vie. Il  l'oblige à voler toujours plus haut, même  quand elle n'en peut plus et qu'elle veut se  fracasser sur le  bitume." Maxence qui lui explique  que  les  adultes  "font des erreurs, et après , ils ont plus la  force  de  tout recommencer." Comme leur mère qui  les aime mais  pas  au point de les emmener loin du Démon, leur père qui explose en crises de rage incontrôlable, les roue de coups  et fait régner la terreur. Maxence qui va préférer un jour partir au Pays sans adultes ...41tiQLxqwgL._SL500_AA240_.jpg
En lisant le deuxième roman de Ondine Khayat j'ai plus d'une fois songé à Momo le  héros de La vie devant soi d'Emile  Ajar alias  Romain Gary. Même émotion , même invention langagière  mais ici la voix enfantine  triture les mots pour mieux faire ployer le réel, pour s'en échapper ne serait-ce qu'un instant.
Partant d'une situation émotionnellement  très forte, (j'ai eu les larmes aux yeux à plusieurs reprises),l'auteure  tempère la violence par l'évocation du monde très imagé de Slimane. On frôle parfois le pathos et peut être aurait-il fallu un tout petit peu raccourcir certains passages afin  de donner davantage de densité au récit mais il n'en reste pas moins que j'ai  dévoré d'une traite ce roman très émouvant.  Une vraie voix, intense et belle.

Merci à  Suzanne de Chez  les  filles et aux Editions Anne Carrière pour ce "pur moment d'émotion."

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27/11/2008

"Quand j'y repense, c'est vrai, je n'ai pas pleuré, j'ai vomi."

Une atmosphère lourde, épaisse. celle d'une cité. Pas de noms, juste des numéros: "Cité 12 et ciel de Meuse. Département 62." Et une fille qui boxe : Angélique. Contraste entre le prénom  empli de douceur et le mal être qui s'exprime d'une manière quasi animale, et ce dès l'école primaire. Alors forcément Angélique s'est attiré des ennuis.
Sa manière de vouloir s'endurcir, "durcir, encore et toujours,jusqu'à ce que tout se brise sur elle, sans que rien ne l'égratigne. Et tant pis pour les autres. Ils l'avaient voulue comme ça , ils n'avaient qu 'à compter leurs abattis." ne pourra cependant pas éviter qu'un jour la vie la mette au tapis...41+I74-NOyL._SL500_AA240_.jpg
Alternant récit et prise de parole du personnage, Angélique boxe est un roman dense et noir où subsiste  pourtant une flamme tremblotante d'espoir. En effet, même rouée de coups, au propre ou au figuré, L'adolescente se relève car elle a une énergie vorace .

La violence de l'héroïne est cependant présentée d'une manière dérangeante : "à se chercher comme ça, comme de jeunes lionceaux qui jouent aux grands, il y avait quelque chose de sain, qui désamorçait au lieu d'envenimer. Une manière de dire les choses au lieu de les laisser moisir, sans pour autant que cela touche à la violence, la vraie. Mais ça , les grands, ils comprennent pas, ils ont du mal." Cette violence qui se donne à voir au sein de l'institution scolaire ne peut évidemment être tolérée par le maître d'école. L'auteur nous indique auparavant que les frères d'Angélique eux ""pouvaient"se battre", mais il faut noter qu'ils le font en dehors de l'école. On laisse donc entendre qu'Angélique ne peut être violente car elle est une fille. Il est évident que les bagarres au sein de l'école ne sont pas tolérées qu'elles concernent filles ou garçons.
En outre, la langue qu'utilise le personnage qui, certes a progressé au cours de sa scolarité, est très riche et on se demande bien pourquoi elle a choisi de s'exprimer avec ses poings plutôt qu'avec des mots.

Bilan mitigé donc, non sur la forme ,mais sur le fond.

Angélique boxe Richard Couaillet. Actes Sud Junior.

26/11/2008

"Bonjour le programme essorage ! Plus de gras, des couleurs ravivées...et la tête à l'envers."

Il a suffi d'un petit "clic", celui d'un appareil photo intégré à un téléphone portable ,pour que Manon se prenne une grosse claque : voir la photo de ses fesses circuler à travers tout le lycée.
Par réaction, l'ado crée un blog et sous le pseudo de Grauku, balance à la tête de ses lecteurs ses kilos en trop et son mal être qu'elle combat à coups de plaques de chocolat. une certaine Kilodrame va l'aider à perdre du poids et va l'entraîner , par la même occasion ,dans une drôle de spirale...5166aRCUKSL._SL500_AA240_.jpg
Avec un style vigoureux Sophie Laroche nous brosse le portrait sans complaisance ni mièvrerie d'une ado  à la fois forte (on sent une vraie personnalité) et faible devant la nourriture et le regard des autres.
Les relations amicales sont fouillées au scalpel, tout le monde en prend pour son grade, mais on sent néanmoins une véritable tendresse qui se dégage de cette histoire.
Sophie Laroche n'a pas oublié -rare privilège - ce qu'était l'adolescence  et elle nous en offre une vision franche et juste. Une vraie découverte !

Le Carnet de Grauku. Sophie Laroche. Editions Mic_Mac

Merci à Cuné pour l'envoi !

Le blog de l'auteure.

Ps : lu et approuvé par Madame ma fille ! :)

 

 

21/11/2008

Bonne nouvelle

"La grosseur du caratère a été spécialement  étudiée pour faciliter une lecture à voix haute." ,certes mais  elle donne aussi un vrai  confort de lecture pour tous ces  ados  qui rechignent à ouvrir un livre car " C'est écrit trop petit". En plus les volumes de la collection "D'une  seule  voix" chez Actes Sud Junior  sont très minces (entre 60 et 70 pages) et abordent  des thèmes originaux suceptibles  d'intéresser  les ados. De quoi convertir les plus réfractaires à la lecture ?

* Rien que ta peau. Cathy Ytak.76 pages.

Difficile pour toutes les mères de voir leur fille grandir et devenir une femme. Mais  cela l'est encore plus pour la mère de Louvine car cette dernière est lente,obsédée par les couleurs et qu'elle a du mal  à  se décider. Certains la jugent même idiote ...51VIYif-xOL._SL500_AA240_.jpg
Cathy Ytak dans une écriture au plus près des sensations donne voix à Louvine et nous emmène dans son monde si particulier et si riche.510gROpMgzL._SL500_AA240_.jpg

 

*La piscine était vide.Gilles Abier. 65 pages.

Accident ou pas ? Le jugement  vient  d'être rendu : Célia n'a pas poussé  Alex dans la piscine vide.  Libre, l'adolescente revient qur  l'enchaînement des faits qui ont fait qu'elle, petite jeune fille délurée , a été accusée de meurtre par la mère d'Alex.
Gilles Abier ne cherche pas à nous rendre les personnages sympathiques mais, avec une grande sensibilité,  il leur confère une humanité qui nous les rend proches .

Merci à Bellesahi pour  cette  découverte.

14/11/2008

Lettre à Ralph

Cher Ralph,

Grâce à Amanda, que je remercie au passage, j'ai pu dévorer la suite de tes  aventures  commencées ici. Sept ans ont passé et une  fois encore Stoney Calhoun va se trouver aux prises avec des cadavres. Mais dans  Casco Bay, il  ne mène  plus l'enquête en franc  tireur car le Sherif Dickman va l'enrôler comme adjoint , ce qui nous vaut une hilarante improvisation de serment :
"-Moi, Stonewall Jackson Calhoun, je jure solennellement de  faire  respecter toutes les lois  de l'Etat du Maine qui me semblent sensées, dit Calhoun. Je  jure de faire ce que tu me demandes de faire, pourvu que  ce  ne soit pas trop stupide. je  jure que si, à tout moment, tu veux que je démissionne,je donnerai ma  démission sans faire  d'histoires. Je jure que pour l'essentiel je te dirai la vérité. Je jure de ne pas être  d'accord avec toi quand  je  te trouverai stupide. je  jure que si tu me demandes mon opinion , je  te  la donnerai , même si je  pense que ç apeut te  blesser. (Il haussa les  épaules) Bon, j'ai tout dit, hein  ? "414A+iVRDeL._SL500_AA240_.jpg
L'enquête, il faut bien l'avouer est menée de manière assez paresseuse et le  meurtrier vient quasiment  de  jeter dans les  bras de  Calhoun,  bras qu'il a fort musclés car il fend régulièrement du bois de chauffage, autant dans un but utilitaire que pour se vider la tête. Heureusement qu'en bon chien , tu  es là pour relancer l'action, Ralph, je dois dire que j'ai tourné fébrilement les pages au moment de ta disparition ! c'est bien aussi l'un  ses  rares moments où Calhoun a  perdu de son flegme, autrement il est d'une sérénité exemplaire, même quand il ne comprend pas  sa chérie qui le malmène. Elle ferait bien de faire  attention d'ailleurs, car je ne suis pas  la seule à juger Calhoun éminemment  sexy,( quoi qu'en pense  certaine Dame qui se gausse :)). J'ai  beaucoup apprécié aussi  ta manière à la fois ferme et efficace, mais sans hargne , de mâchouiller les coucougnettes du meurtrier. A croire  que la sérénité de Calhoun t'a  été transmise par osmose.  Serait-ce  l'influence de Ralph Waldo  Emerson, en  l'honneur de qui tu  as  été nommé? celle de Thoreau? Ou bien un autre effet du coup  de foudre auquel  ton maître  a  survécu mais en perdant la  mémoire ? Quoi qu'il en soit, cela le rend  fichtrement  intéressant comme  homme  et comme apparemmment il a  terminé  sa lecture de l'anthologie littéraire ,pas  de problème, je peux glisser ma  Pal dans une ou  deux valises et aller le  rejoindre. Un homme  qui  aime parler de pêche ou  de chiens et qui  vit dans une maison au fond des bois ne peut pas être  totalement  mauvais.

L'avis de  Laure

 

Casco bay William  G. Tapply. Gallmeister.  291 pages

29/10/2008

"La voix des enfants et leur pureté."

Un flic à la retraite,au cuir épaissi -du moins le croit-il, un jeune flic drogué mais très doué, voilà  un  de ces improbables  duos comme nous les aimons. Ce qui va les rapprocher ? Le meurtre d'un chilien d'origine allemande, chef  de choeurs de garçons de plusieurs églises dans Paris. Piste politique? Piste pédophile ? Chacun des flic a  sa préférence mais la réalité va vite s'emballer et dépasser toutes leurs hypothèses...
Jean-Cristophe Grangé est au mieux de sa forme dans Miserere. Certes, il emploie des procédés classiques (la relation père-fils  qui s'établit entre les deux héros,  les fausses  pistes) mais c'est pour mieux tromper son lecteur  qui , ainsi mis  en confiance, ne peut que se laisser surprendre par les chausse-trappes que l'auteur a ménagés.51P+YKPP2CL._SL500_AA240_.jpg
Ses héros trimballent leurs zones d'ombre mais elles ne sont évoquées qu'en pointillés et leur élucidation nous explose  à la figure au moment où  nous les  avions preque oubliées. Kasdan, le vieil arménien retraité et Volokine, le jeune loup russe, évoluent  principalement dans un décor  urbain, très cinématographique, et les péripéties se succédent, toujours plus étonnantes. L'intensité monte dans l'horreur, mais sans complaisance. Grangé utilise certains thèmes historiques  qui pourraient sembler rabâchés mais il les  dynamite,les poussant à l'extrême , sans pour autant tomber dans les excès pseudo ésotériques du Concile  de  pierre. Un roman profondément pessimiste sur l'âme humaine, un roman  traversé par la  musique, un roman que vous ne lâcherez pas une fois que vous l'aurez commencé et dont vous sortirez groggy . Ames sensibles s'abstenir !

Miserere. Jean-Cristophe Grangé.Albin michel.524 pages