10/07/2010
Winter
"J'ai appris des choses tout au long de cet hiver, de cette saison des rêves, et j'en ai oublié d'autres, de vieilles choses dont je n'aurai plus besoin désormais."
L'écrivain Rick Bass et sa compagne dénichent un travail de gardiens de propriété, ce qui leur permet de réaliser leur rêve: s'installer dans un coin reculé du Montana, en plein hiver.
L'expérience, qui sidère leurs familles respectives, s'avère passionnante et très enrichissante tant par la confrontation avec la nature qu'avec l'adaptation aux moeurs des autochtones."Il peut arriver n'importe quoi.", tout peut basculer et rien ne vaut cet exil volontaire dans un cadre à la fois magnifique et potentiellement dangereux pour en prendre conscience. de quoi réfléchir pour ceux qui voudraient se lancer dans l'aventure...
Pour reprendre les mots de Madame de Sévigné concernant le printemps en les adaptant à l'expérience de ce livre: Si vous voulez savoir ce que c'est qu'un hiver, il faut venir à Rick Bass !
Un livre qui séduira tous les amoureux de Nature Writing, et j'en fais bien évidemment partie !
Winter, Rick Bass, traduit de l'américain par Béatrice Vierne, Folio 2010, 261 pages crissantes de neige et crépitantes de feu de bois.
"un bain de fraîcheur" pour Papillon.
Pickwick a été un peu moins séduite.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (19) | Tags : rick bass
09/07/2010
La Bar-Mitsva de Samuel
Titre à lire à distance des repas, je vous aurais prévenus.
"Elles étaient tellement vieilles que la seule jeunesse qu'on pouvait voir en elles, c'était en les imaginant en pouponnières à asticots".
Je croyais apprécier l'humour noir et l'ironie mordante mais La Bar-mitsva de Samuel vient de me démontrer que j'avais des limites.
En effet, ce récit de la vie d'une jeune juif français exilé contre son gré au Canada entre une mère qui ne l'aime pas (mais a su l'enlever à son père , resté en France) et un beau-père des plus effacé ne m'a laissé aucun espace pour respirer.
C'est un univers d'une noirceur quasi absolue, où la violence est banalisée (en particulier celle faite aux femmes) très cru, avec un langage ordurier (les femmes ne sont que des c...et on les espère vicieuses dès le plus jeune âge), où les personnages ne semblent capables d'aucune empathie.
Quant à la vision du Canada, elle est au diapason de ce qui précéde. On me dira que c'est ici la vision outrée d'un adolescent torturé par ses hormones mais bon, désolée, je ne compatis ni ne ris une minute.
06:00 Publié dans Lâches abandons, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : david fitoussi, humour très très noir
06/07/2010
La mémoire courte / Le noir qui marche à pied
"Zondi était bien forcé d'admettre qu'il était un soldat d'élite, mais que le champ de bataille n'était plus à la mesure des hommes de bonne volonté."
Zondi est noir et sa qualité d'inspecteur lui permet de côtoyer toutes les couches sociales de cette Afrique du Sud qu'il "aimait de toute son âme et de ses tripes mais [...] détestait de toute sa tête."
Paradoxe qui court aussi bien dans La mémoire courte que dans Le noir qui marche à pied. Pas de politiquement correct en effet dans ces réflexions de l'inspecteur Zondi qui se déconnecte souvent de la réalité pour se lancer dans des analyses sur le fonctionnement de cette société qui se cherche et où l'égalité n'existe pas , même si ça n'a pas seulement à voir avec la couleur de la peau.
Les clichés existent de part et d'autres et ont la vie dure. Le décalage entre la vison des uns et la réalité des autres est immense : " Zondi était fasciné par le témoignage naïf de ce Blanc ignorant et primitif qui lui décrivait le monde où il avait passé toute son enfance comme un cloaque sale et inquiétant, truffé de pièges et de bandes rivales alcooliques qui auraient passé leur temps à s'entreégorger et à se dépouiller. Pour lui Soweto avait toujours été "la maison"; l'endroit où il y avait le sourire de son père et de sa mère, son école primaire et la boutique où il allait chercher du pain ou des petits sachets de thé quand sa mère l'envoyait faire des courses."
Chacun en prend pour son grade, aussi bien les Blancs qui se terrent dans leur villas bunkérisées que les Noirs qui se veulent des assistés permanents...
Et les intrigues dans tout ça ? Amateurs d'analyse de poils de nez et de raclures d'ongles ou de scénarios au cordeau, passez votre chemin ! Nous ne sommes pas dans une série américaine, comme les répètent à plusieurs reprises notre héros , même si lui même sacrifie un peu à la thématique obligée du bel homme qui fait passer son boulot avant une histoire de couple qu'on sent dès le premier volume vouée à l'échec.
Les intrigues naviguent entre violence extrême et relations bon enfant entre flic et voyous, passant d'un aspect à l'autre avec un naturel déconcertant. On se croit chez Maigret et on bascule chez Thilliez.
Le plus surprenant étant peut être que l'auteur, Sud-Africain d'expression anglaise écrit directement en français, un français hérité de ses ancêtres huguenots et protège soigneusement son identité afin de garder sa liberté de parole.
Une découverte décapante. Deux romans parus initialement chez Phébus et sortis chez Points Seuil.
A lire dans l'ordre pour profiter de l'évolution du personnage.
Laurent, ils sont pour toi ! Je te les apporte ...bientôt !
06:01 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (9) | Tags : louis-ferdinand despreez, afrique du sud
01/07/2010
La sexygénaire n'a pas dit son dernier mot
Elle a beau le répéter à longueur de temps, l'amour pour elle c'est fini, on se doute bien qu'elle craquera un jour ou l'autre. Elle ? Marie, une fringante et toute fraîche sexagénaire doté d'un chat, d'un fils et d'une belle-fille qui vont bientôt la rendre grand-mère, sans oublier une jeune invitée française à demeure.
Marie se rebiffe contre les idées toutes faites concernant la vieillesse. Pas question pour elle d'apprendre une langue étrangère ou de partir crapahuter à l'autre bout du monde ! Elle aborde la soixantaine avec enthousiasme mais aussi un peu de mélancolie.
Malgré son prénom, Marie est bien anglaise (merci d'avoir vérifié dans la VO Juliette !:) mais je n'ai pas trouvé dans ce livre l'impertinence que j'espèrais.
C'est sympathique en diable, sans prétention mais traduit à la truelle. Ainsi je ne connaissais pas les fleurs de cercueil mais plutôt celles de cimetière, les conducteurs ne me flashent pas mais m'adressent plutôt des appels de phares, sans oublier un fâcheux"Je relaxe sans dire un mot".
Remarquons au passage que le titre original est bien moins imagé que le français, n'est pas sexy qui veut !
Un roman qui ne révolutionnera pas la littérature, mais ce n'est pas ce qu'on lui demande, à lire impérativement au soleil et quand on a dépassé la quarantaine.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (7) | Tags : virginia ironside, nan j'ai pas encore soixante ans ! mais je me renseigne
30/06/2010
Finnigan et moi
Finnigan , "un tiers humain, un tiers animal, un tiers gobelin de livres de contes pour enfants", "espèce (...) sauvage et indomptée répandant le chaos sur son passage" a passé un pacte avec Answell quand ils étaient enfants . Faire le mal sera l'apanage de Finnigan, le bien celui d'Answell.
Ce dernier, sous la coupe de parents qui veulent tout contrôler, se réjouit dans un premier temps de cette alliance. mais quand une vague d'incendies et de méfaits vient semer la zizanie dans cette petite bourgade australienne, Answell va essayer d'arrêter son ami.
Finnigan existe-t-il vraiment ? La question de l'identité, celle de la responsabilité sont au coeur de ce roman qui brouille les frontières entre fantastique et réalité.
Une écriture poétique puissante qui sait créer un climat étouffant, un roman tout à la fois beau et angoissant sur le passage de l'enfance à l'adolescence.
Finnigan et moi, Sonya Hartnett, traduit d el'angalis (Australie) par Bertrand ferrier, Le serpent à plumes 2009, sorti en poche.
Un des rares romans à avoir échappé à la malédiction de la PAL qui fond !:)
Merci Cuné !
Tout le monde l'avait lu, sauf moi !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (14) | Tags : sonya hartnett, australie, adolescence
25/06/2010
Blonde
1110 pages en édition de poche mais jamais d'impression de longueurs. Joyce carol Oates s'empare de la vie de Marylin Monroe , la sculpte, la brasse à sa guise et la transforme en une fiction fascinante qui distille un sourd malheur.
De "l'orpheline", dont la mère a été placée en maison de santé, à la star trébuchant sur ses talons hauts, gavée de substances qui l'aident à dormir ou à se réveiller, "morceau de viande" exploité sans vergogne par les studios mais aussi par presque tous les hommes de son entourage, Oates nous offre un portrait à multiples facettes de celle qui voulait qu'on l'appelle Norma Jeane et qui considérait "Marylin" comme un personnage encombrant : "J'emmerde Marylin. Elle n'est pas ici.".
On la suit dans les pricipales étapes de son existence et même si on connaît tous plus ou moins l'existence de la star, on est happé par cette tragédie en marche.Puissant et poignant, on n'en sort pas indemne.
Blonde, Joyce Carol Oates, Livre de poche, traduction de l'anglais (Etats-Unis) par Claude Seban.
Gérard Collard a récemment signalé qu'il fallait se précipiter sur les exemplaires en poche, cette édition allant disparaître...
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (31)
23/06/2010
L'inconnu d'Athènes
"J'ai choisi le conformisme plutôt que l'amour."
Un microcosme bien clos sur lui-même: la petite île grecque de Thiminos. Un accident: une jeune et jolie femme retrouvée morte au pied d'une falaise. Affaire classée pour la police mais pas pour ce mystérieux Inconnu d'Athènes qui, sans esbrouffe, va venir faire éclater une vérité bien dérangeante.
Grâce à Anne Zouroudi nous pénétrons dans cette petite communauté ilienne qui, par bien des aspects, sembel davantage relever de l'Antiquité que de la modernité, tant par son mode de vie, très austère et frugal que par ses croyances hors d'âge. Ce lien avec la tragédie grecque n'est-il pas d'ailleurs établi par ce mystérieux enquêteur prénommé Hermès ?
Une ambiance très bien rendue, un roman de facture classique en apparence mais où l'enquêteur est hors normes..
Merci Cuné !
L'inconnu d'Athènes, Anne Zouroudi, traduit de l'anglais par Clara Mallier Gallimard 2008,356 pages très prenantes.
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (5) | Tags : anne zouroudi, grèce, policier
22/06/2010
Indian Creek
"Encore des idioties à la Davy Crockett."
Peut être parce qu'il a beaucoup lu de récits de trappeurs se traînant sur des kilomètres une balle dans la jambe, peut être et surtout parce qu'il ne se rend pas vraimentcompte de ce que cela va représenter, le jeune Pete Fromm accepte de passer sept mois en solitaire au coeur des Montagnes Rocheuses.
Rapidement l'ennui se révèlera être son pire ennemi car veiller sur le bassin à saumons, sa seule responsabilité, ne l'occupe guère et l'hiver qui s'installe le coupera presque totalement du monde extérieur.
Indian Creek est un très joli roman d'apprentissage où le décalage entre la vision romanesque de l'auteur et la réalité brute montre sa sincérité et sa candeur de l'époque et le rend d'autant plus sympathique.
Néanmoins, sorry, Pete Fromm ne rejoindra pas le cercle très fermé de mes Hommes des Bois Préférés (à savoir Julius Winsome et Stoney Calhoun ) !
Indian Creek, Pete Fromm ,Gallmeister collection Totem 2010, traduit de l'américain par Denis Lagae-Devoldère, 238 pages 100% Nature.
L'avis tentateur de Papillon !
Celui, enthousiaste, d'Isabelle !
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (12) | Tags : pete fromm, un chien, un homme, la solitude
19/06/2010
Petit bréviaire du braqueur, Petite bombe noire
Excellente nouvelle : Petit bréviaire du braqueur est à nouveau disponible en poche! Précipitez-vous !
Et si vous ne l'avez pas encore fait profitez-en pour découvrir Petite bombe noire !
Leur auteur, Christopher Brookmyre, possède un humour vachard, un style vigoureux ("plus serré qu'un cul de dromadaire pendant une tempête de sable") et ses héros roulent souvent à une vitesse "diana-cide" . Ses intrigues sont pleines de rebondissements et se déroulent dans une région pas du tout glamour , l'Ecosse, qu'il connaît comme sa poche et qu'il nous rend attachante avec ses supporters de foot azimutés et ses alcools variés. Mais surtout Brookmyre, comme les "méchants" de ses livres, est un grand spécialiste de la manipulation jubilatoire. On se laisse mener en bateau avec bonheur aux côtés de l'inspectrice Angélique de Xavia qui , petite, femme et noire , cumule tout ce qui peut déplaire à ses collègues. A défaut de collectionner les amants (elle déplore qu'ils soient moins nombreux que ceux qu'elle a refroidis), elle accumule les ceintures noires dans divers sports de combat mais n'en reste pas moins une femme qu'il faut traiter avec délicatesse même si ,comme dit un de ses collègues admiratifs,elle a des couilles.
Brookmyre pulvérise avec panache tous les poncifs du genre policier (la prise d'otages dans Bréviaire... est un régal) et nous gratifie au passage d'une analyse politico-économique de la pipe (pas celle de saint Claude, l'autre) ou d'une diatribe contre les Pauves Enculés de Banlieusards...Un régal !
Tous deux disponibles chez Points Seuil.
06:00 Publié dans le bon plan de fin de semaine, romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (15) | Tags : christopher brookmyre
18/06/2010
Du bout des doigts
"Ta fortune, c'est l'avenir qui la fera."
Londres, 1862. Issue du quartier des voleurs et des receleurs, la jeune Sue Trinder accepte de participer à une escroquerie sur la personne d'une riche héritière de son âge-bientôt dix-huit ans, Maud Lilly. Mais les événements ne vont pas se dérouler comme prévu...
Ouvrir Du bout des doigts c'est s'immerger à la fois dans le monde des bas-fonds de Londres, avec ses codes de conduite et son argot, mais aussi découvrir l'univers beaucoup plus feutré et confiné de bibliophiles d'un genre particulier. C'est aussi se laisser surprendre par des coups de théâtre à tiroirs, par tout un jeu de manipulations perverses.
Alternant les points de vue de Maud et de Sue, Sarah Waters n'en donne que plus de profondeur à son récit et à son interrogation sur l'identité. Elle nous peint un univers où les femmes peuvent, suivant le bon plaisir des hommes, être retirées de la société, quelle que soit leur condition sociale, soumises qu'elles sont à l'autorité masculine.
Il n'en reste pas moins que ses héroïnes, tour à tour flamboyantes ou brisées , ont une énergie folle qui leur permet d'affronter les épreuves qui jalonnent ces neuf mois de leur vie.
Mariage secret, traîtrises, détention, sont quelques uns des motifs des romans noirs du XIXème siècle que l'auteure revisite avec aisance et détourne avec bonheur. L'atmosphère des ruelles de Londres ,grouillantes de voyous et de gens du peuple ,est particulièrement bien rendue-on s'y croirait !- et le lecteur ne s'ennuie pas une minute tout au long de ces 750 pages qui filent à toute allure !
Dire que j'ai laissé dormir 4 ans ce chef d'oeuvre dans ma PAL! pfff !
Du bout des doigts, Sarah Waters, 10/18, traduit de l'anglais par Erika Abrams.
L'avis d'Ys qui vous conduira vers plein d'autres...
06:00 Publié dans romans étrangers | Lien permanent | Commentaires (28) | Tags : sarah waters, un pavé qu'on lit d'une traite, un pur bonheur